En même temps, il songeait à rendre la couronne impériale héréditaire dans sa famille et il convoqua la diète de Ratisbonne pour faire élire son fils, par anticipation, « roi des romains ».
Devant le péril qu’eût représenté cet accroissement de la puissance de la maison de Habsbourg (dont par ailleurs, un membre régnait sur l’Espagne, les Pays-Bas et une partie de l’Italie du nord), Richelieu intervint auprès de tous ceux qu’alarmaient les ambitions de Ferdinand II. Il obtint l’entrée dans la guerre du roi de Suède, Gustave-Adolphe et à la diète de Ratisbonne, le Père Joseph « éminence grise » de Richelieu, contribua à faire échouer tous les projets de l’empereur.
L’armée suédoise, qui était une armée nationale disciplinée, disposant d’un armement à tir rapide, débarqua en Allemagne en juillet 1630, conquit la Poméranie, écrasa l’armée de Tilly à Breitenfeld en septembre 1631, s’empara de Mayence, puis marcha sur la Bavière et remporta la victoire du Lech, où Tilly fut tué en avril 1632, remonta en Saxe et défit l’armée de Wallenstein à la bataille de Lützen, où Gustave-Adolphe fut mortellement blessé le 16.11.1632. Ferdinand II fit assassiner, en 1634, Wallenstein qui projetait de rétablir à son profit le royaume de Bohème. Privée de son chef, l’armée suédoise subit un désastre à Nordlingen en 1634 et Bernard de Saxe-Weimar, l’autre chef des mercenaires, prit le commandement des forces protestantes. Richelieu fit intervenir la France directement dans la lutte en déclarant la guerre à l’Espagne, qui s’était emparée des possessions de l’archevêque-électeur de Trêves.
Bernard de Saxe-Weimar occupe l’Alsace, les troupes espagnoles envahissent la France, assiègent St Jean de Luz, mettent le siège devant St Jean de Losne en Franche-Comté, et au nord atteignent la Somme et s’emparent de Corbie. Cependant, elles furent contenues et repoussées à Arras en 1640, le Roussillon fut repris en 1642 et l’armée de Bernard de Saxe-Weimar passa, à la mort de ce dernier, au service de la France.
Après la mort de Richelieu, Mazarin continua sa politique. Les espagnols furent battus à Rocroi le 19.05.1643 par le duc d’Eghien, futur prince de Condé; en 1644, Turenne remporta en Allemagne la victoire de Fribourg, celle de Nordlingen en 1645 et menaça Vienne. Les suédois enlevèrent Prague et face à la menace qui pesait sur sa capitale, l’empereur se résigna à faire la paix. L’épuisement était d’ailleurs général et des négociations avaient commencé dès 1644 dans deux villes de Westphalie, à Munster et Osnabrück, où furent signés une série de traités le 24.10.1648.
L’Espagne reconnaissait l’indépendance des Provinces-Unies, mais se refusa à traiter avec la France, alors affaiblie par la Fronde. La possession par la France des trois évêchés, Metz, Toul et Verdun qu’elle occupait depuis 1552, et de Pignerol en Italie, fut confirmée. L’Empereur cédait à la France les terres impériales en Alsace (sauf Strasbourg). La Suède reçut la Poméranie occidentale, les bouches de l’Oder ainsi que les territoires des évêchés sécularisés de Brêmes et de Verden. Le duc de Bavière conservait le Haut Palatinat et le titre d’électeur. Le Brandebourg s’agrandit de la Poméranie orientale, de Magdebourg, des duchés de Clèves et de Juliers et de l’évêché de Minden, prenant ainsi pied dans la Rhénanie. Le calvinisme fut reconnu au même titre que le luthéranisme; les princes conservaient le droit de choisir leur religion et de l’imposer à leurs sujets, selon le principe cujus regio, ejus religio (à chacun la religion de son souverain); les sécularisations antérieures à 1624 furent maintenues.
Le Saint Empire romain germanique était morcelé en plus de 350 états souverains; la couronne impériale demeurait élective et l’empereur continuait à n’avoir qu’un pouvoir nominal. La France et la Suède, garante de l’application des traités, eurent un siège à la diète d’empire, sans laquelle l’empereur ne pouvait rien.
Ainsi, à la suite de ces guerres, la Bohème cessa d’exister en tant que royaume indépendant et elle ne renaquit qu’avec les traités qui suivirent la Première Guerre Mondiale. Quant à l’Allemagne, qui mit plus d’un siècle à se relever de ses ruines, elle demeura un pays d’organisation médiévale jusqu’à la suppression du Saint Empire romain germanique par Napoléon 1er en 1806.
Mais l’électorat de Brandebourg commença son ascension, qui le conduisit à devenir un royaume, puis l’état le plus puissant de l’Allemagne, dont il devait exclure l’Autriche. Ces traités sont ainsi une date capitale dans l’histoire de l’Allemagne et de l’Europe; ils marquent le début d’une politique que l’on a appelée « l’équilibre européen » et qui a consisté dans une répartition des forces telle qu’aucun État ne devienne assez puissant pour menacer l’indépendance des autres.
La Paix des Pyrénées: Bien que ses troupes eussent subi un nouveau désastre à Lens le 20.08.1648, le roi d’Espagne, Philippe IV, avait refusé de faire la paix avec la France, espérant tirer profit des troubles survenus alors que Mazarin gouvernait le pays, et notamment de la Fronde. La guerre se prolongea pendant plus de dix ans, marquée par des combats indécis. Finalement, Mazarin gagna l’Alliance de Cromwell et la victoire franco-anglaise des Dunes, près de Dunkerque, en 1658, contraignit le roi d’Espagne à traiter. La paix des Pyrénées, signée le 7.11.1659, reconnut à la France la possession de l’Artois, de quelques places fortes du Nord, ainsi que celle du Roussillon et de la Cerdagne. Le traité stipulait en outre, comme gage de paix, le mariage de Louis XIV avec la fille aînée de Philippe IV, Marie Thérèse, qui abandonnait ses droits sur la couronne d’Espagne moyennant le paiement d’une dot de 500 000 écus d’or. Cette clause fut à l’origine de la politique extérieure de Louis XIV.
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