Annexion de l’Alsace-Lorraine

DOCUMENT du TRAITE d’ANNEXION de L’ALSACE-LORRAINE (1871)

I. Préliminaire de paix – Versailles, le 26 février 1871

Entre le chef du pouvoir exécutif de la République française, M. Thiers et le ministre des affaires étrangères, M. Jules Favre, représentant la France, d’un côté, et, de l’autre, le chancelier de l’empire germanique, M. le comte Otto de Bismarck-Schœnhausen, muni des pleins pouvoirs de S. M. l’Empereur d’Allemagne, roi de Prusse ; Le ministre d’État et des Affaires étrangères de S. M. le roi de Bavière, M. le comte Otto de Bray-Steinburg ; Le ministre des Affaires étrangères de S.M. le roi de Wurtemberg, M. le baron Auguste de Waechter ; Le ministre d’État, président du conseil des ministres de S.A.R. Mgr le grand-duc de Bade, M. Jules Jolly ; représentants l’Empire germanique ;Les pleins pouvoirs des deux parties contractantes ayant été trouvés en bonne et due forme, il a été convenu ce qui suit, pour servir de base préliminaire à la paix définitive à conclure ultérieurement :

ART. 1. – La France renonce en faveur de l’Empire allemand à tous ses droits et titres sur les territoires situés à l’est de la frontière ci-après désignée : La ligne de démarcation commence à la frontière nord-ouest du canton de Cattenom, vers le grand-duché de Luxembourg, suit, vers le sud, les frontières occidentales des cantons de Cattenom et Thionville, passe par le canton de Briey en longeant les frontières occidentales des communes de Montois-la-Montagne et Roncourt, ainsi que les frontières orientales des communes de Sainte-Marie-aux-Chênes, Uni-Ail, Habonville, atteint la frontière du canton de Gorze qu’elle traverse le long des frontières communales de Vionville, Bouxières et Onville, suit la frontière sud-ouest de l’arrondissement de Metz, la frontière occidentale de l’arrondissement de Château-Salins jusqu’à la commune de Pettoncourt dont elle embrasse les frontières occidentale et méridionale, pour suivre la crête des montagnes entre la Seille et le Moncel, jusqu’à la frontière de l’arrondissement de Sarrebourg au sud de Garde. La démarcation coïncide ensuite avec la frontière de cet arrondissement jusqu’à la commune de Tanconville, dont elle atteint la frontière au nord ; de là elle suit la crête des montagnes entre les sources de la Sarre blanche et de la Vezouse jusqu’à la frontière du canton de Schirmeck, longe la frontière occidentale de ce canton, embrasse les communes de Saales, Bourg-Bruche, Colroy-la-Roche, Plaine, Ranrupt, Saulxures et Saint-Blaise-la-Roche du canton de Saales et coïncide avec la frontière occidentale des départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin jusqu’au canton de Belfort, dont elle quitte la frontière méridionale non loin de Vourvenans pour traverser le canton de Delle, aux limites méridionales des communes de Bourogne et Froide-Fontaine et atteindre la frontière suisse, en longeant les frontières orientales des communes de Jonchery et Delle.

L’Empire allemand possédera ces territoires à perpétuité, en toute souveraineté et propriété. Une commission territoriale, composée des représentants des hautes parties contractantes, en nombre égal des deux côtés, sera chargée, immédiatement après l’échange des ratifications du présent traité, d’exécuter sur le terrain le tracé de la nouvelle frontière, conformément aux stipulations précédentes.

Cette commission présidera au partage des biens-fonds et capitaux qui, jusqu’ici, ont appartenu en commun à des districts ou des communes séparés par la nouvelle frontière ; en cas de désaccord sur le tracé et les mesures d’exécution, les membres de la commission en référeront à leurs gouvernements respectifs. La frontière, telle qu’elle vient d’être décrite, se trouve marquée en vert sur deux exemplaires conformes de la carte du territoire formant le gouvernement général d’Alsace, publiée à Berlin en septembre 1870, par la division géographique et statistique de l’État-major général, et dont un exemplaire sera joint à chacune des deux expéditions du présent traité.

Toutefois, le tracé indiqué a subi les modifications suivantes, de l’accord des deux parties contractantes : dans l’ancien département de la Moselle, les villages de Sainte-Marie-aux-Chênes, près de Saint-Privat-la-Montagne, et de Vionville, à l’ouest de Rezonville, seront cédés à l’Allemagne ; par contre, la ville et les fortifications de Belfort resteront à la France avec un rayon qui sera déterminé ultérieurement.

ART. 2. – La France paiera à S.M. l’Empereur d’Allemagne la somme de 5 milliards de francs. Le paiement d’au moins 1 milliard de francs aura lieu dans le courant de l’année 1871, et celui de tout le reste de la dette dans un espace de trois années, à partir de la ratification des présentes.

ART. 3. – L’évacuation des territoires français occupés par les troupes allemandes commencera après la ratification du présent traité par l’Assemblée nationale, siégeant à Bordeaux. Immédiatement après cette ratification, les troupes allemandes quitteront l’intérieur de la ville de Paris, ainsi que les forts situés sur la rive gauche de la Seine et, dans le plus bref délai possible, fixé par une entente entre les autorités militaires des deux pays, elles évacueront entièrement les départements du Calvados, de l’Orne, de la Sarthe, d’Eure-et-Loir, du Loiret, de Loir-et-Cher, d’Indre-et-Loire, de l’Yonne, etc., de plus, les départements de la Seine inférieure, de l’Eure, de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, de l’aube et de la Côte-d’Or jusqu’à la rive gauche de la Seine. Les troupes françaises se retireront en même temps derrière la Loire, qu’elles ne pourront dépasser avant la signature du traité de paix définitif. Sont exceptées de cette disposition la garnison de Paris dont le nombre ne pourra pas dépasser 40 000 hommes, et les garnisons indispensables à la sûreté des places fortes. L’évacuation des départements situés entre la rive droite de la Seine et la frontière de l’Est, par les troupes allemandes, s’opérera graduellement après la ratification du traité de paix définitif, et le paiement du premier demi-milliard de la contribution stipulée par l’article 2, en commençant par les départements les plus rapprochés de Paris, et se continuera au fur et à mesure que les versements de la contribution, seront effectués. Après le premier versement d’un demi-milliard, cette évacuation aura lieu dans les départements suivants : Somme, Oise et les parties des départements de la Seine-Inférieure, Seine-et-Oise et Seine-et-Marne, situées sur la rive droite de la Seine, ainsi que la partie du département de la Seine et les forts situés sur la rive droite. Après le paiement de 2 milliards, l’occupation allemande ne comprendra plus que le département de la Marne, des Ardennes, de la Haute-Marne, de la Meuse, des Vosges, de la Meurthe, ainsi que la forteresse de Belfort avec son territoire qui serviront de gage pour les 3 milliards restants, et où le nombre des troupes allemandes ne dépassera pas 50 000 hommes. S.M. l’Empereur sera disposée à substituer à la garantie territoriale, consistant dam l’occupation partielle du territoire français, une garantie financière, si elle est offerte par le gouvernement français dans des conditions reconnues suffisantes par S.M. l’Empereur et Roi pour les intérêts de l’Allemagne. Les 3 milliards dont l’acquittement aura été différé porteront intérêt à 5 % à partir de la ratification de la présente convention…… (suite)

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